Le sari blanc est de mise pour les veuves
photo rita banerji
Les textes
traditionnels considèrent le mariage comme indissoluble une fois le
rituel des sept pas (saptapadi)
accompli. Certains écrits admettent
toutefois le divorce dans les cas extrêmes comme les violences
physiques ou l’abandon. Plus on s’élève dans l’échelle des castes, plus
la séparation est difficile et suscite la réprobation générale. La loi
indienne permet le divorce par consentement mutuel ou sur demande du
conjoint qui le demande pour sévices physiques ou abandon. Dans la
réalité, la plupart des femmes indiennes préféreront subir la violence
de maris ivrognes plutôt que d’encourir le rejet de leur entourage.
Sans revenus, elles ne possèdent d’ailleurs pas d’autres ressources en
cas de rupture que de retourner sous le toit de leurs parents, qui
souvent refuse cette honte et cette charge financière. Seules les
femmes de la bourgeoisie éduquées et soutenues par leurs amies ou leur
famille se risquent d’entamer des procédures de divorce.
La situation de veuve est pire que celle de divorcée. Elles peuvent maintenant se remarier, mais les obstacles à franchir demeurent énormes. À partir du moment où son mari meurt, elle se retrouve reléguée ipso facto au rang de domestique. C’est comme si la société considérait l’épouse responsable du décès de son mari. Immédiatement après la mort de ce dernier, on retire à la veuve ses bijoux et on lave la marque de sindur, poudre de vermillon qui orne ses cheveux et définit son statut de femme mariée. Elle ne pourra désormais que se vêtir de blanc, couleur de deuil, ou de bleu. Les couleurs vives, en particulier le rouge, symbole du mariage, ainsi que les ornements lui sont dorénavant interdits. Elle ne participera plus aux grandes réjouissances familiales et traditionnelles ou sera simplement tolérée et reléguée dans le coin d’une pièce. Elle n’est plus invitée aux noces où elle ferait figure de mauvais présage. Il ne lui reste que sa belle-famille, qui la traite de haut, ne lui donnant à manger que les restes des repas, la laissant dormir sur le sol et l’obligeant à marcher pieds nus. Quelquefois, elle sera renvoyée dans sa famille ou dans des établissements pour les veuves, sortes de mouroirs où elles doivent se lever avant l’aube et réciter des mantras en l’honneur de Krishna. Le très beau film EAU (Water) de la cinéaste indienne Deepa Mehta exprime de manière très touchante le sort des veuves en Inde au moment de l’indépendance du pays. L’actualité médiatique nous donne de plus en plus d’exemples de femmes courageuses qui refusent la pression familiale et sociale et s’opposent à ces traditions ancestrales.
La déesse Savitri assure la protection de son mari
photo kulasundari
La sati désigne le rituel de l’immolation glorieuse des veuves sur le bûcher funéraire de leur époux. On retrouve des récits de cette pratique dans les écrits des Grecs de l’expédition d’Alexandre (IIe siècle av. J.-C.) et dans certaines épopées hindoues. Ce sacrifice des veuves était surtout répandu au Bengale et au Rajasthan. Cette coutume a d’abord été abolie par les Anglais au début du XIXe siècle puis elle fut déclarée illégale par le Code pénal indien et ceux qui contribuent à la perpétuer doivent être poursuivis pour meurtre. Mais les Indiens érigent souvent au-dessus des lois leurs usages traditionnels et les médias rapportent encore ici et là de très rares cas de pratique de la sati.